Préface_Au fil du texte

 

La détente §1

ἀθλητικοῖς: le sport était important dans la vie des Grecs à toutes les époques de leur histoire, puisqu'on trouve déjà des exercices gymniques organisés lors des funérailles de Patrocle dans l'Iliade. On connaît par ailleurs l'importance des jeux panhelléniques organisés à Olympie, Delphes, Némée et Corinthe, qui imposaient des trêves lors des guerres entre Grecs, pour leur permettre d'y assister. Généralement, on présente l'exercice physique comme une relaxation fort bienvenue après une activité  intense. Ici Lucien déjoue le topos habituel en présentant la lecture de son ouvrage comme une détente analogue à celle qui est offerte par la pratique du sport.

 

La culture générale §2

των παλαιῶν: Lucien fait ici allusion à l'omniprésence des auteurs "classiques" dans l'éducation des jeunes Grecs. C'est à partir de ceux-ci que les enfants apprenaient à lire et à écrire et que les adolescents se livraient aux exercices de grammaire et de rhétorique. Homère et Hésiode étaient à cet égard incontournables, d'où le grand nombre de références et d'allusions qui leur sont faites.

 

Les antécédents §3

Κτησίας: Ctésias naquit à Cnide en Carie dans la seconde moitié du Ve siècle. Il appartenait à la confrérie des Asclépiades, qui pratiquaient la médecine et concurrençaient les médecins de Cos, lesquels relevaient de l'école d'Hippocrate. A la suite d'une aventure inconnue, il fut fait prisonnier de guerre par les Perses et séjourna à Suse, où il fut bien considéré Tout en pratiquant son art, il s'intéressa aux archives et composa ses histoires. Il participa à la bataille de Cunaxa (401 a.C.) en tant que médecin d'Artaxerxès. Vers la fin de sa vie, il put retourner en Grèce et s'y occupa de publier ses "histoires" - des Persica et des Indica - connues à travers les résumés du patriarche Photios (IXe s.) et des citations indirectes. Il eut le mérite de savoir beaucoup de choses, mais le défaut d'aimer exagérément ce qui est théâtral et/ou merveilleux.

Ἰαμβοῦλος: Iamboulos ne nous est connu qu'à travers le résumé qu'en donne Diodore de Sicile (II, 55-60), ce qui permet de situer sa vie au moins avant 50 a.C. On suppose qu'il a vécu après Posidonios d'Apamée, philosophe stoïcien, qui avait parlé d'une cité du Soleil, c'est-à-dire après 150 a.C. De sa vie, nous savons uniquement qu'il fut marchand. Enlevé par des brigands éthiopiens avec un compagnon, il fut envoyé par eux avec ce compagnon en tant que victimes expiatoires vers le Sud. Au terme d'une longue navigation, les deux hommes parvinrent aux îles du Soleil où ils séjournèrent et furent à même d'observer de nombreuses singularités. Comme ils semaient le trouble parmi les habitants, ils furent renvoyés chez eux, ce qui permit à Iamboulos de raconter par la suite cette aventure.

Ὀδυσσεύς: les allusions à Homère renvoient au récit fait par Ulysse aux Phéaciens et plus particulièrement à l'escale dans l'île d'Eole (IX, 567-X, 1-79); au séjour chez les Cyclopes ( IX, 105-540); à l'épisode tragique des Lestrygons (X, 80-139); à la navigation au large de Charybde, monstre marin occupant l'écueil du même nom, qui engloutit les navires passant à sa portée,  et Scylla, rocher auour duquel les eaux formaient un tourbillon (XII, 85-110); enfin, au séjour chez Circé (X, 140-400).

 

Le but de l'ouvrage §4

καὶ τοῖς φιλοσοφεῖν ὑπισχνουμένοις: on retrouve ici le contentieux de Lucien avec les philosophes, dont le sophiste a eu une vision plus que négative lors de son séjour à Athènes et qui a déchaîné sa verve satirique dans les Dialogues des morts. Il leur reproche notamment leurs querelles oiseuses et la  non conformité de leurs actes et de leurs pensées.

μυθολογεῖν: le reproche de mêler la fable à l'histoire est également formulé par Strabon (I, 2, 35), qui reproche aux Indographes, c'est-à-dire aux historiens qui ont accompagné Alexandre et à leurs disciples et qui ont décrit l'Inde, d'avoir trompé ainsi le lecteur et de ne pas avoir établi de rapport "vrai". On se rappelera que Thucydide (I, 21)reprochait déjà à Hérodote d'avoir introduit des "mythes" dans son oeuvre et qu'il tenait à se démarquer en cela de son illustre prédécesseur.

ἀρχήν: le mot doit être entendu ici au sens mythique: il signifie le commencement absolu, comme le premier principe des philosophes ioniens ou la genèse du monde.